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Commentaire hebdomadaire

Taux d’inflation près de 2 % au Québec : de retour sous la moyenne nationale malgré la hausse plus rapide des loyers

23 août 2024
Hélène Bégin
Économiste principale

Par le passé, au Québec, la variation annuelle de l’indice des prix à la consommation (IPC) a suivi d’assez près celle de la moyenne canadienne. Quelques écarts ont toutefois été observés au cours de certaines périodes au fil du temps. Par exemple, de janvier 2023 à mai 2024, le taux d’inflation de la province s’est maintenu au-delà de celui de l’ensemble du pays (graphique 1). L’économie du Québec tournait toutefois alors au ralenti, soit bien en deçà du rythme observé au Canada. Le taux d’inflation a été supérieur à la moyenne nationale jusqu’à tout récemment, et ce, malgré la chute qu’a encaissée le PIB réel de la province du printemps 2023 à la fin de l’année.


L’économie du Québec a effectué un retour en force Lien externe au site. depuis le début de 2024 en regagnant tout le terrain perdu dès avril. Malgré ce rebond, l’inflation continue de ralentir. Depuis juin, la variation annuelle de l’IPC a même glissé sous celle du Canada, dont l’économie est en perte de vitesse. Le taux d’inflation a atteint 2,5 % en juillet au pays, comparativement à 2,3 % pour le Québec.

 

Outre l’état de santé de l’économie qui agit avec un certain décalage sur l’inflation, d’autres éléments plus spécifiques ont parfois la capacité d’influencer sa trajectoire, notamment l’évolution de certaines composantes clés du panier de référence de Statistique Canada Lien externe au site.. L’analyse des tendances récentes de certaines d’entre elles permet de regarder droit devant plutôt que de se fier au rétroviseur. Les principales dépenses en biens et services des ménages au pays sont effectuées pour le logement (28,6 %), l’alimentation (16,7 %) ex aequo avec le transport (16,8 %).

 

Tout comme au Canada, l’indice global des prix du logement est le principal facteur qui exerce une pression vers le haut sur l’inflation au Québec. En juillet, l’IPC de cette composante a progressé de 6,6 % par rapport à un an plus tôt dans la province et de 5,7 % au pays. Le rythme plus élevé au Québec s’explique notamment par l’augmentation nettement plus rapide des loyers (graphique 2), soit une hausse sans précédent depuis que les statistiques sont compilées. En excluant la composante logement de l’IPC total en juillet, le taux d’inflation a augmenté de seulement 0,8 %.


Les facteurs démographiques devraient pourtant entraîner une progression plus modérée des loyers que dans l’ensemble du pays. Selon l’Institut de la statistique du Québec Lien externe au site., la croissance de la population a atteint un record l’an dernier, quoique moins rapide qu’ailleurs au Canada. La forte demande d’appartements locatifs exerce bien entendu une pression sur les loyers à travers le pays, mais l’augmentation du nombre de ménages n’est qu’une partie de l’équation.

 

La flambée des loyers particulièrement aiguë au Québec s’explique surtout par l’offre insuffisante de logements disponibles et l’ajout au compte-gouttes d’appartements neufs au parc actuel. La construction, qui avait pris son envol à la suite de la pandémie, a chuté brusquement lorsque les taux d’intérêt ont remonté après avoir atteint le fond du baril. Les mises en chantier d’appartements locatifs conventionnels au Québec ont même fléchi de 9,0 % en 2022 et de 27,4 % en 2023. Le coût d’emprunt trop élevé a compromis la rentabilité de plusieurs projets, qui ont dû être retardés, voire annulés. La relance de la construction est bien enclenchée depuis le début de 2024 comme analysé dans le Zoom sur l’habitation Lien externe au site., mais les deux années particulièrement difficiles pour les constructeurs ont maintenu le marché locatif en situation de grave pénurie, entraînant les loyers encore plus fortement vers le haut.

 

Selon le Groupe Altus, le Tribunal administratif du logement (TAL) avait recommandé une majoration des loyers de 2,3 % l’an dernier au Québec, puis du double en 2024, soit 4,6 % pour les logements non chauffés. Il s’agit d’un bond inégalé en plus de 30 ans qui s’applique aux immeubles âgés de plus de 5 ans. L’Enquête sur les appartements locatifs de la Société canadienne d’hypothèques et de logement (SCHL) de l’année 2024 devrait ainsi révéler une progression plus élevée des loyers que celle de 7,4 % l’année précédente, du moins au Québec.

 

Les hausses devraient être encore plus salées pour les appartements neufs, d’après les résultats de l’enquête du Groupe Altus dévoilés dans le magazine Immobilier Commercial cet été. Par exemple, dans la RMR de Québec, la majoration des loyers des immeubles assez récents (construits depuis 2022) devrait atteindre en moyenne 6,6 % en 2024‑2025, comparativement à 5,0 % un an plus tôt.

 

Aucun répit ne semble ainsi en vue concernant la forte progression des loyers au Québec. Par conséquent, l’inflation de la composante logement restera élevée malgré le mouvement baissier en cours des taux d’intérêt hypothécaires qui soulagera une partie des emprunteurs. Rappelons toutefois que le taux de propriété de 60 % au Québec se maintient à un niveau moins élevé qu’au Canada. Par conséquent, 40 % des ménages de la province subiront encore un certain temps les augmentations démesurées des loyers. Cela rehaussera par le fait même le coût de la vie des locataires davantage que la mesure d’inflation totale le suggère.

 

En somme, le taux d’inflation provincial est repassé sous la moyenne canadienne cet été en raison de la progression plus modérée des composantes autres que le logement, telles que l’alimentation et les transports, dont la hausse avoisinait 1,5 % en juillet au Québec, alors qu’elle se situait entre 2 % et 3 % au pays. Étant donné leur volatilité, il n’est pas certain que ces composantes réussiront à contenir le taux d’inflation au Québec sous la moyenne nationale au cours des prochains mois, c’est-à-dire jouer le rôle de soupape permettant de faire contrepoids à la pression nettement plus forte qui persiste sur les loyers. Un répit durable passera donc par une hausse de la construction de logements, ainsi qu’une hausse de la productivité.

Lire la publication Indicateurs économiques de la semaine du 18 au 22 juillet 2022

Consultez l'étude complète en format PDF.

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