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Jimmy Jean • Randall Bartlett • Benoit P. Durocher • Royce Mendes • Hélène Bégin • Tiago Figueiredo
Francis Généreux • Lorenzo Tessier-Moreau • Hendrix Vachon
Dernier kilomètre de désinflation : la Fed s’est fait distancer
Faits saillants
- Malgré un climat géopolitique tendu qui a amené davantage de volatilité sur les cours boursiers et sur les prix des matières premières, notamment du pétrole, l’économie mondiale présente des signes d’amélioration. Le PIB réel chinois a connu une bonne croissance trimestrielle au début de 2024. En Europe, les indices PMI, entre autres du côté des services, offrent aussi de meilleures perspectives (mais pas encore de signe de croissances très fortes), après plusieurs trimestres de stagnation. L’inflation continue d’y évoluer dans le bon sens et pourrait amener la Banque centrale européenne à bientôt décréter le début des baisses de taux directeurs.
- Aux États‑Unis, de nombreux indicateurs suggèrent que l’économie demeure relativement forte. La résilience de l’économie américaine, notamment de son marché du travail, se reflète dans une inflation qui se montre résolument plus tenace, surtout du côté des services. Dans ces circonstances, la Réserve fédérale devrait patienter jusqu’à l'automne avant de commencer ses baisses de taux directeurs.
- Les données économiques continuent de surpasser les attentes au Canada. La croissance du PIB réel s’est améliorée et l’inflation a été plus faible que prévu au début de 2024. Le marché du travail montre aussi des signes précurseurs de ralentissement. Si cette tendance se maintient jusqu’à la prochaine annonce sur les taux d’intérêt de la Banque du Canada (BdC), cela ne fera que renforcer notre prévision selon laquelle les baisses de taux débuteront en juin. La BdC devrait ensuite assouplir graduellement sa politique monétaire, puisque les renouvellements hypothécaires à des taux plus élevés continueront de restreindre le budget des ménages et de peser sur la consommation. Nos travaux ont montré que, si elle est mise en œuvre telle qu’énoncée, la récente décision du gouvernement fédéral de réduire le nombre d’admissions de résidents non permanents exercera une pression à la baisse supplémentaire sur la croissance du PIB réel et sur l’inflation à moyen terme. Du côté de la politique budgétaire, les nouvelles dépenses annoncées ce printemps par différents paliers de gouvernements ne devraient pas avoir une incidence trop importante sur les perspectives d’inflation. Toutefois, les nouvelles mesures annoncées dans le budget fédéral sont de nature à stimuler l’investissement dans la construction résidentielle, et à ralentir l’investissement des entreprises (voir notre analyse du budget de 2024 pour plus d’information).
- Au‑delà des perturbations de certaines statistiques économiques depuis l’automne dernier, en lien avec les grèves dans le secteur public, le PIB réel du Québec a subi trois reculs trimestriels d’affilée du printemps 2023 à la fin de l’année. Le rebond de 1,9 % du PIB réel en janvier, qui s’explique en grande partie par le retour au travail des employés des secteurs de l’éducation et de la santé, sera toutefois temporaire. Même si la période de contraction semble terminée, les difficultés de l’économie du Québec se poursuivront d’ici la véritable reprise qui devrait se manifester en seconde moitié de 2024. Le marché du travail continuera ainsi à se détériorer. Le taux de chômage, qui se situait à 5,0 % en mars, poursuivra sa remontée et devrait avoisiner 6 % au cours des prochains mois. Ce niveau est bien au-dessus du creux historique de 3,9 % atteint en novembre 2022.
Risques inhérents aux scénarios
Bien que l’inflation ait baissé, elle demeure au‑dessus de sa cible dans la plupart des pays et nous ne sommes pas à l’abri de nouveaux chocs. Les probabilités d’avoir des hausses de taux d’intérêt supplémentaires restent faibles, mais ceux‑ci pourraient demeurer à leur niveau actuel pour une période prolongée en l’absence de progrès sur l’inflation. Il y a aussi une bonne dose d’incertitude entourant l’effet retardé des taux d’intérêt élevés sur la croissance économique. La poursuite des renouvellements hypothécaires à des taux plus élevés que les précédents pourrait se traduire par un trop grand nombre d’emprunteurs en difficulté de paiement au Canada. Cela est sans compter que le taux de chômage pourrait augmenter plus fortement, ce qui aurait probablement des effets adverses sur le marché de l’habitation. Aux États‑Unis, l’élection présidentielle de novembre pourrait changer la donne et provoquer davantage d’incertitude. La détérioration des finances publiques, aux États‑Unis comme ailleurs, pourrait entraîner une révision à la baisse des notations de crédit et, possiblement, une hausse des taux d’intérêt à long terme. De l’instabilité pour l’économie mondiale, les marchés financiers et les prix des matières premières pourrait aussi provenir de la détérioration de l’environnement géopolitique, notamment à la suite de la confrontation entre Israël et l’Iran, ou encore résulter d’une nouvelle escalade de la guerre en Ukraine. Du point de vue des devises, si l’économie mondiale se détériore fortement, plusieurs investisseurs pourraient préférer trouver refuge auprès du dollar américain, ce qui l’aiderait à s’apprécier. Un élargissement plus marqué des écarts de taux d’intérêt avec les États‑Unis aurait le même effet. Une dépréciation rapide de devise pourrait avoir des effets déstabilisants pour plusieurs économies.
Scénario financier
L’inflation encore trop élevée aux États‑Unis a incité de nombreux investisseurs à miser sur un scénario de baisses de taux plus modérées. De notre côté, nous avons réduit à deux le nombre de baisses prévues en 2024. Une première réduction est attendue à l'automne, à condition que l’inflation diminue et que la croissance économique américaine se modère un peu. Les gains de productivité élevés aux États‑Unis devraient aussi aider à réduire l’inflation. Au Canada, l’inflation plus faible suggère que la Banque du Canada dispose déjà d’une certaine marge de manœuvre pour amorcer ses baisses de taux. Il peut y avoir un certain écart entre les politiques monétaires américaine et canadienne, mais le dollar canadien en paie le prix. Il s’est déjà déprécié dans les dernières semaines, tout comme d’autres devises. Il est probable qu’il demeurera faible dans les prochains mois et pourrait tester momentanément le seuil de 1,40 $ CAN/$ US. La remontée des taux d’intérêt obligataires a freiné l’élan des marchés boursiers. Plusieurs valorisations demeurent élevées. Il y a encore de la place pour des pertes de valeurs au cours des prochains mois.
Tableaux de prévisions
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