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Commentaire hebdomadaire

Nouveau duel Biden-Trump : un premier aperçu des politiques budgétaires

28 mars 2024
Francis Généreux
Économiste principal

La saison des budgets s’achève au Canada alors que l’ultime salve sera tirée par le gouvernement fédéral le 16 avril. Les États-Unis ne sont pas en reste. L’administration Biden a rendu publique le 11 mars dernier sa proposition budgétaire pour l’exercice 2025 qui débutera en octobre prochain. Comme l’an dernier, rappelons que les budgets soumis par la Maison-Blanche sont rarement mis en application comme tels puisque c’est le Congrès qui détient constitutionnellement les cordons de la bourse. 

La publication du budget permet toutefois d’en connaître davantage sur l’évolution des finances publiques à la lumière des priorités et des souhaits de l’administration en place. Elle permet de chiffrer plus précisément l’incidence des propositions du gouvernement sur les finances publiques fédérales. Cet exercice devient d’autant plus intéressant lors d’une année d’élection présidentielle. Dans le cas actuel, il permet de discerner les priorités et les vues de l’actuel occupant du bureau ovale dans l’éventualité où il est reconduit pour un deuxième mandat. Cela rend possibles les comparaisons avec les propres propositions de ceux qui veulent prendre sa place. Cela met donc la table pour en connaître un peu plus sur les possibles conséquences budgétaires du nouveau duel Biden-Trump.

Le portrait actuel des finances publiques fédérales américaines

Comme base de comparaison, il faut avoir une idée de la situation financière actuelle du gouvernement fédéral américain et des perspectives pour les prochaines années. L’exercice 2023, qui a pris fin le 30 septembre dernier, s’est soldé par un déficit de 1 695 G$ US (6,3 % du PIB) et une dette détenue par le public qui atteignait 26 240 G$ US (97,3 % du PIB). Les plus récents résultats des comptes fédéraux affichent que le déficit cumulé sur 12 mois était de 1 801 G$ US à la fin de février dernier et que la dette était passée à 27 380 G$ US.

Les prévisions du Congressional Budget Office (CBO) publiées en février et qui tiennent compte exclusivement des lois déjà en place tablent sur une amélioration du déficit pour l’exercice 2024 courant, mais sur une détérioration pour la plupart des années subséquentes. Le total des manques à gagner serait de 20 016 G$ US pour l’ensemble des dix exercices de la période 2025-2034. La dette détenue par le public passerait à 48 300 G$ US au terme de l’exercice 2034, soit 116,0 % du PIB.

Le budget Biden

La proposition budgétaire de l’administration Biden présente une certaine amélioration des finances publiques fédérales par rapport à ce que prévoit le CBO sur l’ensemble de la période 2025-2034. À court terme, le déficit serait un tantinet plus grand en 2025 selon les perspectives du gouvernement (1 781 G$ US) par rapport à celles du CBO (1 772 G$ US), mais une différence appréciable se présente par la suite. Le budget Biden prévoit que le total des déficits sur dix ans serait de 16 297 G$ US, soit 3 719 G$ US de moins que ce que prévoit le CBO en se basant sur les lois actuelles. Plutôt que d’atteindre 116,0 % du PIB, la dette détenue par le public serait de 105,6 % en 2024.

 Comment arriver à une telle amélioration relative? Il ne faut pas voir ce que le président Biden a proposé comme de l’austérité, au contraire. Les dépenses publiques passeraient de 6 941 G$ US (24,6 % du PIB) en 2024 à 10 316 ­G$ US (24,2 % du PIB) en 2034. En moyenne sur l’ensemble de la période, leur croissance (4,0 %) s’apparente à celle prévue pour le PIB nominal (+4,2 %). C’est la croissance des revenus qui est bien supérieure (+5,4 %) et qui, surtout, permet d’améliorer un peu les finances.

Somme toute, le budget 2025 de l’administration Biden a surtout une connotation sociale. Les principales nouvelles dépenses reposent sur la santé, l’éducation et sur l’aide pour les familles et les travailleurs. La hausse de l’ensemble des dépenses proviendrait surtout des programmes sociaux et du service de la dette alors que les dépenses discrétionnaires seraient plutôt stables (et même en baisse en proportion du PIB). Les dépenses supplémentaires seraient en partie payées par des hausses des revenus cherchées dans les poches des contribuables plus riches (revenus de 400 000 $ US et plus) et des entreprises. 

Les propositions de Donald Trump et des républicains

Jusqu’à maintenant dans le présent cycle électoral, Donald Trump n’a que très peu proposé de nouvelles mesures concernant l’économie et la fiscalité. Ses discours sont surtout composés d’éloges au bilan économique de son administration et de critiques cinglantes envers les politiques économiques de son successeur qui auraient détruit « l’économie la plus remarquable de l’histoire mondiale ».

Pour le moment, il semble que le programme économique de Donald Trump en vue d’un deuxième mandat repose sur trois éléments : libéraliser la production d’énergie, réduire la réglementation et abroger les hausses d’impôts de Biden. On peut conclure qu’une deuxième administration Trump désirera sans équivoque rendre permanentes les baisses d’impôts décrétées par lui et la majorité républicaine du Congrès à la toute fin de 2017, mais qui prendront fin au début de 2026. Le coût d’une telle mesure serait important, soit environ 3 800 G$ US sur 10 ans. Ainsi, sous l’hypothèse que Trump parvient à reconduire et rendre permanentes les baisses d’impôts qui doivent prendre fin en 2025, la dette détenue par le public pourrait passer à plus de 125 % du PIB en 2033.

Pour avoir une meilleure idée de la politique budgétaire d’une deuxième administration Trump, il faut se tourner vers les membres républicains du Congrès. En fait, il faut se rappeler que même les baisses d’impôts de 2017-2018 étaient davantage issues des propositions des parlementaires des majorités républicaines du Sénat et de la Chambre des représentants que de la Maison-Blanche.

Le Republican Study Committee, un groupe de parlementaires républicains qui inclut les dirigeants de la Chambre des représentants, a récemment publié sa propre proposition budgétaire. Bien qu’ambitieux par son nombre de mesures et de propositions, ce plan n’est pas aussi précisément chiffré que les documents provenant de la Maison-Blanche et du CBO et les comparaisons sont difficiles. D’autant plus qu’il semble inclure des baisses draconiennes de dépenses au cours de l’exercice 2025 qui permettent de nettement améliorer les déficits cumulés sur 10 ans, mais qui semblent difficilement réalisables. Cela dit, ce plan prévoit un retour à l’équilibre budgétaire dès 2031! La dette détenue par le public passerait de 97,3 % du PIB en 2025 à 69,3 % en 2034. Cette amélioration de la situation budgétaire fédérale se ferait malgré le fait que ce budget « couperait les impôts de près de 4 200 G$ US au cours des dix prochaines années ». Pour équilibrer tout cela, les dépenses en 2034 seraient 26 % moindres que ce qui est prévu par le CBO, y compris une réduction de 41 % pour les dépenses discrétionnaires non militaires. Disons que réductions draconiennes proposées par les congressistes républicains demanderaient des changements majeurs dans le fonctionnement du gouvernement fédéral américain.

Des visions un peu plus claires, mais encore incomplètes

Bien qu’elle semble durer depuis déjà longtemps, la campagne électorale est encore jeune. Il reste encore un peu plus de sept mois avant le 5 novembre et les candidats pourront utiliser tout ce temps pour peaufiner et énoncer leur vision pour un deuxième mandat Biden ou Trump. En attendant, la publication du budget Biden et les différentes propositions de Donald Trump et des membres républicains du Congrès permettent de nous donner une première idée de ce que chaque côté veut mettre de l’avant. Le contraste entre les deux partis est d’ailleurs déjà assez frappant. On mise pour chacun sur une continuité de ce qui a été effectué lors des premiers mandats. D’un côté, Biden et les démocrates proposent un État encore bien présent et financé par des hausses d’impôts pour les plus riches et les entreprises. De l’autre côté, on mise sur des allègements fiscaux et un rôle moins important de l’État, soit par la déréglementation (Trump) ou par une baisse radicale, mais peu réaliste, des dépenses fédérales (congressistes républicains). Dans tous les cas, il est évident que les défis restent importants pour les finances publiques américaines.

Lire la publication Indicateurs économiques de la semaine du 18 au 22 juillet 2022

Consultez l'étude complète en format PDF.

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